III/ Des relations changeantes (1902-1955)
En 1902, le couple princier se sépare. La nature du pouvoir souverain change en 1911 avec le passage vers une monarchie constitutionnelle qui limite les pouvoirs du prince. En l’absence de princesse consort, Albert Ier et son fils Louis firent – ensemble ou séparément – neuf visites aux soeurs entre 1905 et 1912. En 1911, deux soeurs reçoivent une décoration du prince pour leur dévouement envers les enfants illettrés. Les soeurs entretiennent une correspondance avec plusieurs membres de la famille princière, qui est très formelle. Les demandes et ordres des princes étaient ensuite mis en oeuvre par l’administration de la principauté avec qui les soeurs correspondaient régulièrement.
La Première Guerre Mondiale mit cependant un coup d’arrêt aux activités des soeurs. La famille princière et toute la principauté se mobilisent pour l’effort de guerre. Après la guerre, c’est une autre princesse qui renoue le lien avec les soeurs, Charlotte de Valentinois. Fille unique et légitimée du prince héritier Louis, elle devint princesse héréditaire en 1922. Elle en assume le rôle de représentation et s’implique dans des oeuvres caritatives. Elle fit seule au moins sept visites chez les soeurs entre 1914 et 1928, à qui elle manifeste son intérêt. Le 18 mars 1920, des soeurs et des élèves se rendent au palais pour offrir des cadeaux de mariage à la princesse. Les annales narrent que « Nous la reverrons bientôt, nouvelle mariée, dans l’intimité de son salon renouveler avec effusion l’expression des sentiments à l’égard de notre Institut ; d’ailleurs, cette bonne princesse l’a bien prouvé à Liesse... ».
Le 4 juin 1923, la princesse invite les soeurs de l’EJNB et les religieuses de Saint-Vincent de Paul à être les premières à voir son nouveau-né, le prince Rainier. Charlotte de Monaco fit une visite par an de 1926 à 1928, et ne semble plus y revenir. Son époux, Pierre de Polignac, ainsi que leurs deux jeunes enfants, Antoinette et Rainier, firent plusieurs visites dans les écoles.
En 1926, sept soeurs sont décorées par Louis II pour leurs trente années de service auprès des enfants de la principauté. Ces décorations devinrent relativement fréquentes, des soeurs étant décorées à des échéances plus ou moins rapprochées de la médaille d’honneur, voire pour les plus méritantes comme chevalier ou officier de l’ordre de Saint-Charles. Malgré ces marques d’estime, les soeurs reçurent moins de visites à partir des années 1920 et le prince intervenait de moins en moins dans les affaires relatives aux soeurs. Toutefois, les activités des soeurs n’ont pas semblé souffrir de ces changements. L’Institut prospère à Monaco : en 1925, les soeurs ouvrent des classes de niveau secondaire. L’offre d’enseignement se diversifie avec l’ouverture de cursus professionnels et de cours privés à La Condamine et Monte-Carlo.
Si les soeurs sont plus devenues plus indépendances vis à vis du pouvoir princier, la famille princière est très morcelée au début des années 1930. Charlotte de Valentinois et son époux Pierre de Polignac divorcent en 1933 après treize années de mariage. Rainier et Antoinette sont encore de jeunes enfants. Louis II décore plusieurs soeurs mais ne semble pas revenir faire des visites dans les écoles. Ce dernier règne lors de la Seconde guerre mondiale, pendant laquelle Monaco est occupée en 1942 par les Italiens, puis en 1943 par les Allemands.
À la majorité de son fils Rainier en 1944, Charlotte renonce à son titre de princesse héréditaire en sa faveur et part vivre à Paris et au domaine de Marchais. La guerre s’achève en 1945. En 1946, Louis II épouse la comédienne française Ghislaine Dommanget. Celle-ci fait une visite chez les soeurs la même année. Louis II décède en 1949 et Rainier III lui succède.