III Fondation des Écoles Charitables (1662-1675)
Au cours de ses déplacements de paroisse en paroisse autour de Rouen, le Père Barré propose de rassembler les fillettes pauvres pour leur enseigner la lecture et le catéchisme. Il reçoit l’aide de deux femmes : Françoise Duval, âgée de 18 ans, originaire de Honfleur et fille d’un riche marchand, et Marguerite Lestocq, 20 ans, d’origine picarde et parente de Nicolas Barré.
Les premières classes sont ouvertes à Sotteville-lès-Rouen, en 1662. Durant un an, Françoise Duval et Marguerite Lestocq réunissent deux fois par jour les filles et femmes qui souhaitent profiter de l’enseignement qu’elles dispensent. Leur mission se poursuit ensuite dans le quartier des Minimes de Rouen. Elles sont rapidement rejointes par d’autres femmes désireuses d’enseigner. Des bienfaiteurs mettent à leur disposition des locaux pour que se tiennent les classes, et participent aux frais des Maîtresses des Écoles Charitables.
Nicolas Barré désire créer une communauté séculière rassemblant les Maîtresses. Il refuse de demander l’obtention de lettres patentes au roi, qui officialiseraient cette création et contraindraient les Maîtresses, considérées comme religieuses, à la clôture. Elles peuvent ainsi se déplacer là où la population a besoin d’elles.

Extrait du registre de l'Hôpital général de Rouen concernant le rattachement des Maîtresses des Écoles Charitables à cette institution (17-07-1674, archives des Sœurs de l'EJPR, 7 A 3b-D4)
Appelées « Sœurs », les premières Maîtresses sont coordonnées par Françoise Duval et signent un engagement en 1669, qui est renouvelé annuellement. Elles vivent en communauté, sous l’autorité d’une supérieure et d’une assistante laïque, appelée « Dame Associée ». En 1674, elles sont plus de 200, et les classes à Rouen se multiplient. L’importance que prend la communauté rend nécessaire de l’officialiser. Pour cela, elle est rattachée à l’Hôpital général de Rouen. Ce statut, contrairement aux lettres patentes, permet aux Maîtresses de conserver le droit d’habiter à l’extérieur. Un séminaire pour leur formation est ouvert en 1674, ainsi qu’un séminaire pour les Maîtres des Écoles Charitables.
Nicolas Barré rédige une ébauche de règles pour cette communauté en 1672, alors qu’il doit quitter Rouen pour retourner au couvent de Nigeon, où il est assistant provincial et correcteur. Les premiers Statuts officiels de la communauté paraissent en 1685.
L’entreprise du Père Barré n’échappe pas aux critiques. Des laïcs et des ecclésiastiques, dont des Minimes, sont hostiles aux Maîtresses des Écoles Charitables et à leur action, certains allant jusqu’à calomnier Nicolas Barré et le conduire à se justifier. Pour autant, la communauté et les classes ne cessent de prendre de l’ampleur.