Le long voyage du petit groupe pionnier fut marqué par plusieurs graves difficultés, notamment le décès de la supérieure, sœur Saint-Paulin, et l’accident d'une autre sœur, blessée à la tête. A l’arrivée du bateau à Penang, le 12 avril 1852, les sœurs[3] fondèrent un premier convent-école situé à Light Street[4]. Mais, n’étant plus que deux, elles eurent vite besoin d’être épaulées et encadrées : un autre groupe fut donc appelé de France. La sœur désignée pour en prendre la tête ne put partir, et la supérieure choisit alors sœur Sainte-Mathilde Raclot : un télégramme, reçu le 15 septembre, lui demanda de tout quitter pour venir en urgence à Paris. Arrivée dans la capitale, elle apprit son départ pour la Malaisie et sa nomination comme supérieure. Le 18 septembre, accompagnée de 3 sœurs,[5] elle quitta le continent européen, depuis le port de Southampton. Le groupe débarqua à Penang, le 28 octobre 1852, où il fut tout de suite confronté à différents problèmes : la barrière de la langue, les réticences et mainmise des Pères des Missions Etrangères de Paris... Mère Sainte-Mathilde travailla avec ardeur pour permettre aux sœurs de s’émanciper et les encouragea à apprendre l’anglais et le malais, afin de pouvoir enseigner au plus grand nombre. Malgré de grandes difficultés financières, la communauté recueillit des orphelines, ouvrit des écoles et combattit la prostitution. M. Raclot défendit de nombreuses jeunes femmes victimes d’agressions sexuelles lors de procès. Envers et contre tout, les sœurs tinrent bon, accroissant leur influence en Malaisie et accueillant, dans leurs écoles, jusqu’à 300 élèves.
L’année suivante, un convoi de sœurs anglaises vint prêter main-forte aux sœurs de Malaisie, dans la perspective d’ouvrir une maison et une école pour les plus démunies à Singapour. Mère Sainte-Mathilde collabora activement avec le Père Beurel des MEP pour permettre la réalisation de ce projet. Un groupe de sœurs partit en février 1854 à Singapour. Elles s’installèrent Victoria Street, fondèrent la Caldwell House, et, dix jours après leur installation, débutèrent leur enseignement. Elles ouvrirent deux salles de classes, l’une pour les jeunes filles issues de familles aisées et l’autre, beaucoup plus suivie, pour des jeunes filles pauvres ou abandonnées. Les sœurs travaillèrent de façon acharnée, afin d’aider le plus d'enfants possible. Mère Raclot était particulièrement infatigable, fondant des missions, recherchant des fonds, formant et accueillant de nouvelles sœurs….
Après des débuts compliqués, les sœurs furent peu à peu reconnues par les Pères Missionnaires et les Malais. Cette reconnaissance progressive de leurs qualités et de leur volonté d’évangélisation et d’accompagnement leur permit de développer l’importance territoriale de la mission. En 1859, Mathilde Raclot répondit à un appel pour aller fonder une école à Malacca. Les sœurs y connurent les mêmes problématiques qu’à Singapour ou Penang mais réussirent, là aussi à force de persévérance.